Yamane Akihito

{ WHILE SHE WAS SNOW WHITE
Elle était magnifique. Une femme de toute beauté qui avait toute la vie devant elle. Celle qui attirait les regards et faisait tourner les têtes. Une peau de porcelaine, des cheveux d’ébènes, mais un mal de vivre qui la rongeait sans arrêt. Mais elle crut avoir trouvé son prince et que sa chance tournerait. Un homme romantique qui lui offrait le monde, lui susurrait à l’oreille leur avenir ensemble et lui promettait la lune. Ils vécurent heureux, du moins pendant quelques temps, alors qu’elle semblait ignorer la vérité - ou du moins la refuser. Car aucune femme n’aurait voulu être à sa place alors qu’il lui annonçait qu’il avait déjà sa reine. La relayant au statut de maîtresse. Le prince s’avéra plutôt un serpent qui la repoussa, refusant d’accepter le fait qu’elle attendait un enfant dont il était le père. Et tournant le dos, il la laissa retourner dans son mal de vivre, seule, avec un gamin sur les bras dont la venu dans ce monde ne fût que sang, douleur et combat. Un enfant venu trop tôt, pour une mère qui ne savait pas quoi en faire et qui n’avait probablement pas la force de s’en occuper jusqu’au bout.

Ça dura six ans. Six années pendant lesquelles elle réussit à obtenir l’aide nécessaire pour que son petit prince puisse vivre en santé, entouré d’amour et de sécurité, bien que le statut financier n’était pas sa plus grand fierté. C’était un enfant souriant, heureux, alors qu’elle en faisait que décrépir au fil des ans. Mais ils étaient ensemble, et c’est tout ce qui comptait. Jusqu’au jour où elle fit honneur à sa beauté. Sa peau blanche semblait devenu transparente. Et ses cheveux d’ébènes, normalement si brillants, avaient perdu leur éclat. Se mariant à la perfection avec sa beauté, de sa gorge ouverte s’écoulait un liquide rouge sang. Un corps trouvé par un enfant, qui ne s’en ai jamais remis, hanté par une vision terrifiante d’une femme magnifique qui n’en pouvait plus de vivre, laissant sa seule famille derrière.

{ HE BECAME CINDERELLA
Il ne passa pas beaucoup de temps seul, sa marâtre débarquant soudainement dans sa vie. Une femme hautaine, sans enfant, mais mariée. Une famille stricte qui ne voulait que le meilleur, que l’impeccable et que le doué. Une vie si différente, mais mieux que d’être abandonné. Alors il fit tout ce qu’on lui demandait, affamé d’un amour et d’une affection qui lui semblait hors d’atteinte. Il devint l’enfant parfait que ce type de parent aurait voulu, mais il avait toujours cette terrible impression que ce n’était jamais assez. Et un jour, on l’invita à un bal pour danser. Et plus rien d’autre ne comptait. Il avait trouvé quelque chose qui le rendait heureux et décida qu’on ne pouvait jamais lui enlever. Mais pourquoi avoir un hobby quand on pouvait en faire quelque chose digne de compétition, pensait bien sûr la marâtre.

Alors il dansa, comme il ne l’avait jamais fait, avec l’impression qu’il s’enfonçait dans un océan sombre, se noyant lentement. Il en vint à redouter les matins où il devait quitter son lit pour se plier en quatre sous les désirs de cette figure maternelle qui ne lui donnait jamais l’affection qu’il tentait désespérément d’avoir. La seule chose qui était un pur bonheur dans sa vie, réduit au simple statut de corvée, le laissant haletant et le corps douloureux, les pieds en sang comme s’il avait dansé avec des chaussures de fer rougie par le feu. Sa vie perdit le peu de couleur qu’elle avait, et pour la première fois il sembla comprendre comment se sentait sa mère biologique. Était-il simplement maudit au point de répéter les mêmes erreurs qu’elle? C’était du moins la question qu’il s'était posé avant d’avaler à son tour la pomme empoisonnée qui, pour lui, avait la forme d’une poignée de cachet blanc plutôt que d’un couteau.  À son réveil, il ne se souvenait que d’avoir été malade. Malade à un point où il en vomit du sang, terrifié à l’idée de finir comme sa mère, tremblant et angoissé. Mais sa fin n’était pas arrivée et il quitta bien vite l'hôpital une fois remis sur pieds.

{ AND AS THE BIG BAD WOLF LURKED
Lentement, il se remit à danser. Petit à petit, il recommença à se lier aux autres. Et enfin il eu sa première histoire d’amour. Elle était gentille, drôle. Ils s’entendaient bien. Ce n’était pas le coup de foudre de ses rêves, mais c’était assez pour l’aider à revenir à la surface après avoir été sous l’eau si longtemps. Et pendant un moment, tout était normal. Jusqu’au jour où il rencontra le grand méchant loup. Charmeur, amical, sous les airs bienveillants du père de famille de sa première amourette. Des sentiments terrifiants pour un homme beaucoup trop vieux. Un loup qui, pourtant, ne le quittait pas des yeux et qui n’avait en tête qu’une seule idée; le dévorer.  Et comme le petit chaperon rouge innocent qu’il était, il se laissa entraîner entre les crocs.

Habitué aux ordres, recherchant l’affection, mais surtout manipulé par une figure d’autorité. Il répondait aux moindres demandes et désirs, pliant l'échine pour satisfaire. Car le refus avait des conséquences, ou parfois était simplement ignoré. Il coula de nouveau, retenu sous l’eau entre les griffes d’un prédateur qui refusait de lâcher prise. Il savait qu’il se noierai avant de pouvoir y échapper et il s’était résigné.

{ HE RECEIVED A POISONED GIFT
Il craquait de plus en plus, supportant des choses qu’un adolescent de son âge n’aurait pas dû vivre. Attendant toujours sa marraine la bonne fée qui viendrait le libérer, lui offrir le bal tant mérité après tant d’années à simplement satisfaire les gens autour de lui. Ou attendant son heure, terrifié à l’idée d’y mettre fin par lui-même. Jusqu’au jour où la citrouille apparue; dans sa chambre, une boîte, avec son nom et ses pires secrets. C’était comme lui mettre une image de lui-même, terrifiante de par la vérité qui en émanait. Il crut à une mauvaise blague. Mais sincèrement, qui proche de lui aurait ces informations et ce mauvais sens de l’humour? Et comme il n’avait rien d’autre à perdre, que tout lui avait déjà été enlevé, il décida de suivre les instructions. Se frappant à la déception lorsque rien ne se produisit. Avait-il seulement eu une once d’espoir en croyant que cette boîte pleine de vérité lui donnerait quoi que ce soit d’autre qu’un triste miroir sur sa réalité? Sa fée marraine ne viendrait jamais. Il était condamné à finir dans l’estomac du grand méchant loup, et personne ne ferait rien pour empêcher sa noyade.

Il referma la boîte, mettant un point finale à cette histoire qui ne voulait plus finir tant qu’il n’avait pas soufflé la dernière bouffée d’oxygène, acceptant la défaite, mais surtout son destin.


{ BUT THERE IS NO HAPPY ENDING NOT HERE AND NOT NOW
Le hurlement terrifié qu’il poussa n'alerte personne; la maison était vide et on ignorait leur présence en ces lieux. Il s’était reculé contre le mur, incapable de détourner ses yeux du spectacle sanglant qui se trouvait à ses pieds. Ses jambes l’abandonnèrent bien vite, son estomac se retourna à la vue du liquide sombre qui était la base de ses cauchemars les plus horrifiants. Venait-il de devenir le chasseur qui avait vaincu le loup, alors que le corps encore chaud de la victime gisait à quelques pas de lui? Alors qu’il était sur le point de se faire dévorer, son seul souhait avait été que, s’il vous plaît, quelqu’un, n’importe qui, vienne lui porter secours. Souhaitant un malheur qu’il ne se serait jamais cru capable de souhaiter à qui que ce soit à ce prédateur. Était-il rassuré ou terrifié à l’idée d’être la cause de sa mort? Son corps entier tremblait, craignant ce qui arriverait par la suite. Il n’osa pas bouger. Il n’osa pas sortir et serait sûrement resté là des jours si l’odeur écoeurante ne lui était pas monté au nez.

Et quand il quitta enfin ce cauchemar, se torturant l’esprit à savoir ce qu’il en ferait, il se fit tendre une main. Et comme il n’avait plus rien à lui, pas même son corps et encore moins son esprit, il l’accepta. Décidant que s’il devait suivre les ordres de quiconque, ce ne serait que ceux de celui venu l’arracher aux malheurs qui le contrôlait.

Et son histoire ne prit pas fin tout de suite.